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Page:Inchbald - Simple histoire.djvu/236

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Après avoir lu chaque mot de cette lettre, elle la laissa échapper de ses mains, sans proférer une seule parole, mais pâle, et la mort dans les yeux. — Elle semblait avoir perdu le mouvement et la vie ; miss Woodley, depuis longtemps témoin de toutes ses différentes angoisses, ne l’avait jamais vue dans un pareil état.

« Je n’ai pas besoin de lire cette lettre, lui dit-elle, il suffit de vous regarder pour voir ce qu’elle contient. »

— « Milord, en me regardant pourra donc découvrir tout ce que je souffre ! M’en préserve le ciel ! ce serait encore ajouter à mes peines. »

Quoiqu’elle pût à peine se remuer, elle se lève, s’approche d’une glace, et s’étudie à prendre un extérieur moins capable de la trahir aux yeux de milord. Peine inutile ! Hélas ! c’est uniquement de la sérénité de l’ame que dépend celle du visage !

« Efforcez-vous plutôt, dit miss Woodley, de sentir réellement ce que vous voulez que vos traits expriment. »

— « Ainsi ferai-je, répondit-elle ; je saurai ne sentir qu’une juste fierté, que le mépris bien dû à la manière dont il me traite. »

Et tel était son désir de lui faire voir ce qu’elle annonçait, qu’elle tâcha de s’en pénétrer et de calmer son ame.

« Oui, se disait-elle à elle-même, je n’ai plus que quelques jours à rester avec lui ; encore quelques jours, et nous sommes séparés pour jamais. Eh bien ! pour si peu de temps, il est de mon devoir de lui obéir, ou plutôt de faire ce qu’il me demande, et même il me sera bien doux de lui laisser une impression qui, peut-être, pourra diminuer l’opinion défavorable qu’il a de moi. Si, dans toute autre occasion, ma conduite a été répréhensible, dans celle-ci, du moins, je veux mériter ses éloges. La destinée que je me suis faite moi-même, je saurai la supporter à ses yeux ; je