Page:Inchbald - Simple histoire.djvu/30

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et sur qui je puisse compter ; sûr de son cœur, je n’ai cherché à m’assurer d’aucun autre. J’aurais craint d’avoir à descendre de cette haute estime qu’il m’avait inspirée pour la nature humaine. — Dans ce moment où je ne me rappelle qu’en tremblant les pensées et les actions dont je vais rendre compte, toute vue, tout intérêt humain disparaissent devant moi, et je me crois déjà devant ce tribunal dont chaque instant m’approche. — À qui confierais-je l’unique enfant que je laisse au monde ? Voilà, dans ce terrible moment, l’important devoir qui me reste à remplir. Si je n’écoutais que ces affections terrestres qui m’attachent à cet enfant par les liens de la nature et de l’habitude, si j’en croyais ce qu’on appelle ordinairement amour paternel, je m’occuperais surtout de son bonheur présent ; je la livrerais aux soins de ceux qu’elle regarde comme ses plus chers amis ; mais ces amis ne le sont que dans la prospérité ; dès que la scène change, ils se retirent. Ma fille aura dans sa vie bien des momens de chagrins, de souffrances, de maladies ; comme épouse, comme mère, que de peines l’attendent ! et alors ils l’abandonneront. »

Ici les larmes de l’amour paternel l’emportèrent sur les angoisses de la nature expirante.

« Ainsi abandonnée, continua-t-il, d’où ma fille attendra-t-elle des consolations ? Ce secours puissant que l’on trouve dans la religion, et qui, au milieu des horreurs de l’agonie, soutient mon ame et la remplit de douces espérances, ce secours divin lui sera refusé. »

C’est ici le lieu de remarquer que M. Milner, quoique catholique romain, avait épousé une protestante, et qu’il avait été convenu entre eux que les fils seraient élevés dans la religion du père, et les filles dans celle de la mère. Une seule fille avait été le fruit de leur union, et c’est elle,