Aller au contenu

Page:Inchbald - Simple histoire.djvu/43

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

des lecteurs trop scrupuleux, et prêts à se former de tout des idées exagérées. La vertu de miss Milner n’allait point au-delà de ce que les faibles mortels en ont communément en partage ; peut-être encore trouverait-on, en l’examinant de plus près, qu’elle ne va pas même jusques-là ; mais il faut tout considérer ; si elle a fait plus de fautes que bien d’autres, plus que bien d’autres aussi elle a des droits à l’indulgence.

Dès son enfance, tous ses désirs avaient été accomplis ou prévenus. Gêne et refus étaient deux mots qu’elle avait en horreur.

Sa figure était charmante ; on ne le lui avait dit que trop souvent, et à ses yeux c’était un jour perdu que celui qui n’avait rien ajouté à ses conquêtes. Elle avait encore une sensibilité prompte, qui ne lui permettait pas de dissimuler une injure ni un manque d’égards et d’attention. Elle était d’ailleurs en possession de passer pour une femme d’esprit ; non pas qu’elle eût à l’esprit des prétentions réelles, quoiqu’en l’écoutant, le critique le plus habile eût pu s’y tromper. Mais ses réponses avaient tout l’effet de ce qu’on appelle répartie : sinon parce qu’elles étaient toujours ingénieuses, du moins parce qu’elles étaient vives, dictées par un sentiment rapide, et prononcées avec une ingénuité réelle ou apparente, des yeux baissés ou détournés à propos, et un sourire fin qui semblait à peine effleurer ses traits. Ce qu’elle disait, un autre eût pu le dire ; ce qu’elle avait de plus qu’un autre, c’était la manière de le dire, comme on voit la grace embellir des traits qui, sans elle, auraient paru communs et peu réguliers.

Mais laissons au lecteur à juger lui-même miss Milner par ses propres actions dans toutes les circonstances plus ou moins importantes où elle paraîtra sous ses yeux.