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CHAPITRE V.


Six semaines s’étaient déjà écoulées depuis que miss Milner était à Londres. Les fêtes, les plaisirs remplissaient tous ses momens, et ceux de Dorriforth se passaient dans les alarmes ; il soupirait à la vue des périls dont elle était entourée ; il veillait sur elle avec l’inquiétude d’un père ; il priait ardemment le ciel de ne pas lui refuser son appui. Les amis de miss Milner, ceux de son tuteur, et les nouvelles liaisons qu’elle formait tous les jours, se succédaient chez elle avec une telle affluence, qu’à peine Dorriforth trouvait-il le moment de l’avertir des dangers qu’elle courait. Si par hasard il pouvait être seul avec elle, il se hâtait de lui faire observer combien il est nécessaire de ne pas consacrer tous ses momens à la société, d’en réserver quelques-uns pour la réflexion, pour la lecture, et pour la méditation des devoirs qu’elle aurait à remplir dans un autre état ; enfin, pour acquérir ces vertus qui, seules, pourraient un jour lui alléger le fardeau de la vieillesse. Dorriforth parlait avec une ame pénétrée ; et cette éloquence du cœur est si puissante, qu’elle commandait l’attention de miss Milner. Souvent ses yeux et tous ses mouvemens prouvaient qu’elle y était sensible ; quelquefois même, elle parlait le langage de la conviction ; mais dès que, de nouveau, elle entendait la voix du plaisir, ses bonnes dispositions se changeaient en plaisanteries, et même en plaintes sur l’espèce de gêne qui empêchait une femme de son rang et de sa fortune de jouir des agrémens de la vie.