Page:Inchbald - Simple histoire.djvu/49

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marqua, mais avec indifférence. Jusqu’à présent, une seule passion avait trouvé place dans son cœur, et cette passion, c’était la vanité, le désir, ou plutôt la fureur de briller, d’être admirée, d’augmenter ses conquêtes ; et, tout entière aux intérêts de sa gloire, elle ne songeait pas à plaindre ses victimes. Ce n’est pas que, malgré ses travers, son cœur fût étranger à ce qui est bon et honnête. Souvent même la vertu l’entraînait par des charmes puissans, mais dont l’impression était trop tôt effacée par de nouvelles folies.

Miss Woodley (dont les yeux charitables savaient toujours apercevoir un rayon de vertu, quelque faible qu’il pût être, tandis qu’avec le microscope de la calomnie, elle eût à peine distingué une faute), miss Woodley était au logis sa compagne inséparable, et son avocat auprès de Dorriforth, toutes les fois que miss Milner absente devenait le sujet de leur conversation. Sur les éloges qu’elle prodiguait à sa pupille, Dorriforth concevait des espérances qu’il lui fallait bientôt abandonner, avec le regret de voir combien ces louanges étaient peu méritées. Quelquefois il s’efforçait d’étouffer son indignation, et plus souvent encore de retenir les larmes de pitié que lui arrachait le sort à venir de miss Milner.

Cependant tous ceux qui connaissaient sa pupille ne parlaient plus de milord Frédéric que comme d’un amant déclaré. Les domestiques se le disaient tout bas, et même des feuilles publiques avaient fixé le jour du mariage.

D’autant plus alarmé qu’il n’avait reçu aucune ouverture à ce sujet, Dorriforth fit très sérieusement entendre à sa pupille que la prudence et le soin de sa réputation exigeaient d’elle qu’elle priât lord Frédéric de discontinuer ses visites. Elle ne put s’empêcher de sourire d’une telle