Page:Inchbald - Simple histoire.djvu/59

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ses espérances. De son côté, miss Milner lui déclara à lui-même et à miss Woodley que personne, jusqu’à présent, n’avait trouvé le chemin de son cœur. Il est vrai pourtant que la surveillante miss Woodley s’était, depuis un temps, aperçue de quelques soupirs involontaires échappés à miss Milner, et, au moment qu’elle lui communiqua cette remarque, la rougeur couvrit le visage de sa jeune amie. Miss Woodley soupçonna donc un combat secret entre l’amour et la raison ; la pitié lui rendit sa compagne encore plus chère, et même, au risque de déplaire à M. Dorriforth, elle l’engagea à se livrer à tous les amusemens de la ville, les croyant moins dangereux pour elle que le calme et la solitude.

Miss Milner fut de son avis ; les bals, les spectacles, une société nombreuse lui offrirent des distractions si multipliées, qu’à la fin son tuteur crut devoir se montrer plus sévère qu’il ne l’avait été jusqu’à présent. Toutes les nuits, son repos était troublé par l’image des dangers qu’elle courait loin de lui ; tous les matins, son sommeil était interrompu par le bruit qu’elle faisait en rentrant, et las de la voir consacrer tous ses instans au plaisir, sans qu’il en fût un seul pour la retraite et la réflexion, il crut devoir obtenir au moins, par autorité, quelque trève à tant de folles dissipations.

Une après-midi, qu’il la rencontra par hasard sur l’escalier, il lui dit : « J’espère, miss Milner, que vous passerez la soirée avec nous ? »

À cette question imprévue, elle rougit. — « Oui, » fut le seul mot qui se présenta. Elle savait bien pourtant qu’elle était engagée à une assemblée très brillante, et que même à ce sujet elle avait, depuis plus d’une semaine, consulté sa marchande de modes.