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Page:Inchbald - Simple histoire.djvu/73

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tré aussi combien la fortune de miss Fenton rendait cette union convenable ; et le jeune homme, docile à ses conseils, ne se permit pas de douter un seul moment de toute l’excellence du choix qu’on faisait pour lui. Il est vrai que ce précepteur gouvernait avec un empire si absolu les passions de son élève, que personne, ni le jeune lord lui-même, n’aurait pu dire au juste s’il avait quelques passions.

Ce rigide mentor du comte Elmwood se nommait Sandford. Il avait été élevé chez les jésuites, avant la destruction de leur ordre, dans le même collége que Dorriforth, dont il avait été le préfet. Devenu, depuis, précepteur de son cousin, il avait, comme on voit, plus d’un titre à la considération de toute cette famille ; comme jésuite, c’était un homme très instruit, doué de la constance nécessaire pour ne point renoncer à une entreprise sans en avoir assuré le succès, et assez adroit pour gouverner des hommes plus puissans, mais moins habiles que lui. Le jeune comte s’était, dès son enfance, accoutumé à le craindre comme son maître ; depuis, il avait toujours reçu ses conseils avec docilité et reconnaissance, et il avait fini par l’aimer comme son père. Ces sentimens de crainte et de respect, Dorriforth lui-même n’avait pu les perdre entièrement pour son ancien instituteur.

M. Sandford s’entendait très bien à manier les passions des hommes ; mais sa maxime n’était point qu’il faut chercher à se concilier tous les cœurs. Il y en avait, au contraire, dont la haine lui paraissait digne d’être soigneusement recherchée ; et quand c’était là son but, il était à peu près sûr d’y parvenir plus promptement qu’à se faire aimer. Il réussit, par exemple, à devenir odieux à miss Milner, même au-delà de ses espérances.