Page:Irving - Le Livre d’esquisses, traduction Lefebvre, 1862.djvu/71

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tudes de prudente réserve, et devient joyeux et libre. Il fait en sorte de rassembler autour de lui toutes les commodités, toutes les recherches de la vie élégante et d’en bannir la contrainte. Sa maison de plaisance abonde de tout ce qui est nécessaire pour le calme de l’étude, les plaisirs de la table ou les exercices champêtres. Livres, tableaux, musique, chevaux, chiens et attirail de chasse de toute espèce, vous avez tout sous la main. Il ne contraint en rien ni ses hôtes ni lui-même, mais, suivant le véritable esprit de l’hospitalité, vous procure les moyens d’amusement et laisse chacun y prendre part selon son inclination.

Pour le goût avec lequel ils s’occupent de la culture du sol, pour leur entente du paysage, les Anglais n’ont pas de rivaux. Ils ont étudié la nature avec beaucoup d’attention, et font preuve d’un sentiment exquis de la beauté de ses formes, de l’harmonie de ses combinaisons. Ces charmes qu’en d’autres contrées elle prodigue dans les solitudes sauvages sont ici réunis autour des siéges de la vie domestique. Il semble qu’ils aient surpris le secret de ses grâces modestes et furtives, et qu’ils les aient, comme un enchantement, répandues autour de leurs rustiques demeures.

Rien ne peut être plus imposant que la magnificence d’aspect d’un parc anglais. Ce sont d’immenses pelouses qui s’étendent comme des nappes de vert vif, et çà et là des bouquets d’arbres gigantesques, riches masses de feuillage amoncelées ; — de petits bois et leurs clairières, commandant le respect et l’admiration, et les daims qui les traversent par troupeaux silencieux, le lièvre qui bondit en s’enfonçant dans le fourré, le faisan qui s’envole tout à coup à votre approche ; — un ruisseau à qui l’on a appris tantôt à se perdre en de gracieux détours, tantôt à s’étendre en lac étincelant ; — l’étang solitaire, réfléchissant les arbres qui tremblent ; l’étang et la feuille jaune qui dort sur son sein, et la truite qui fend sans crainte ses eaux limpides ; tandis qu’un temple rustique ou la statue de quelque divinité champêtre, verdis, chargés d’humidité par le temps, donnent à cette retraite je ne sais quel air de sainteté classique.

Voilà quelques traits entre mille du tableau que présente un parc ; mais ce qui surtout me ravit, c’est le talent créateur avec lequel les Anglais de la classe moyenne décorent leurs modeste