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Une femme du monde


Au fond d’un gouffre sinistre et ténébreux, mal éclairé par une flamme rougeâtre, des dames et des messieurs, grelottant de froid sous leurs manteaux et leurs fourrures, simulaient, d’un air très ennuyé, les gestes et les danses, les chants et les paroles de gens qui s’amuseraient prodigieusement.

— Allons, mes enfants, cria Corentin, le vieux régisseur, enlevez-moi le finale en vitesse, et vous pourrez aller vous chauffer les pattes !

Les artistes se groupèrent au centre du plateau, entourés d’un cordon de petites femmes.

— Tout est bien convenu, reprit Corentin. Au refrain, les chœurs dansent la chichirinette. Toi, Jolimont, tu empoignes une des petites, tu l’embrasses, puis tu valses avec elle jusqu’à ce que le rideau soit tombé.

— Laquelle faut-il prendre ? interrogea Jolimont

Le régisseur réfléchit un instant. « Laquelle est-ce, demanda-t-il aux choristes, qui se laisse embrasser le plus gentiment ? »

Quinze petites mains jaillirent vers le cintre, et quinze petites voix s’écrièrent, avec un ensemble que, jusqu’à ce jour, on n’avait jamais pu obtenir d’elles : « Moi, m’sieur ! »

Mais Yoyo sortit du rang. C’était une jolie petite blonde, l’air pas rosse à moitié. Regardant Jolimont