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Page:Ista - Par un beau dimanche, 1921.djvu/191

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acte aussi important ne souffre aucun retard !… Venez signer immédiatement !

Et le vieil oncle abandonna son blessé pour aller signer, docile, l’acte qui le dépouillait à jamais.

Mais il dut être bien récompensé par la joie exubérante de Hougnot, qui s’écria, sitôt la chose faite, en brandissant l’acte dans sa main crispée.

— Ça y est !… Ça y est !… Du champagne !… Du champagne pour tout le monde, maintenant !

— Du champagne, nom d’un cric ! Du champagne ! cria Eudore en courant arracher à Séraphie la clef de la cave.

Joséphine s’approcha de son père et lui souffla dans l’oreille :

— Père, nous n’avons pas apporté assez d’argent, pour payer du champagne.

Mais l’autre ricana, bruyamment :

— De l’argent ?… Nous n’avons pas assez d’argent ?… Et la maison, qu’en fais-tu ?… Nous avons cinquante mille francs, grande bête !

— Premier coup de dent… Le reste suivra vite… murmura le docteur en retournant achever son pansement.

Un peu plus tard, sous une pluie fine et cinglante, dans la nuit opaque que le vent du Nord coupait d’aigres rafales, l’oncle Brusy gravissait la sente escarpée menant de l’auberge à son logis. À quelques pas devant lui, la lueur étroite et courte d’une lanterne sourde, portée par Pas-Bon, dansait sur le sol rocailleux. Derrière, au fond de la vallée, les fenêtres de l’auberge s’éteignaient l’une après l’autre, indiquant que les familles Hougnot et Vireux se couchaient, bercées par la voix d’Eudore, occupé dans le jardin à déterrer quelque bouteille, et hurlant à pleins