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CHAPITRE VIII

PASSEZ MARQUIS ! PASSEZ MUSCADE !


À huit heures du matin, Pierre de Chazelet était debout, habillé, prêt à sortir. Où voulait-il aller ? Nulle part.

Mais après une nuit pendant laquelle l’insomnie avait torturé son esprit et son corps, il s’était levé vers six heures, brisé, une vague migraine l’étreignant aux tempes.

Six heures ! Il ne pouvait se permettre d’aller si tôt trouver Allan.

Alors, pour employer le temps, il avait procédé à une toilette minutieuse, puis il avait essayé de lire, d’écrire.

À huit heures, le garçon lui apporta une lettre. Il la décacheta avec impatience.

Son ami Morand lui mandait qu’il ne s’était pas expliqué sa soudaine disparition du cercle militaire, et le brave médecin concluait :

« Prends garde, tu m’as l’air de rapporter de ton voyage un amour immodéré de l’indépendance. Je t’avertis charitablement, qu’à Paris, ces façons d’être te feront juger fou.

« Rappelle cependant ta sagesse en fuite ; cuirasse « ton cœur d’un triple airain afin de te souvenir que, ce soir, je compte te prendre vers cinq heures au sortir de mon service au Val-de-Grâce.

« Nous dînerons avec quelques bons camarades, et nous terminerons notre soirée au théâtre. Peut-être, ces jours derniers, t’ai-je offert des divertissements un peu graves pour un péripatéticien, retour des solitudes espagnoles. Je veux me faire pardonner.

« Si tu avais disposé de ton temps, un pneumatique au Val-de-Grâce, j’y serai jusqu’à quatre heures.

« Tibi.xxxx
« A. Morand. »

— Brave Morand, monologua le marquis.

Et, glissant distraitement le papier dans sa poche :

— Allan me conseillera. Étonnante, ma confiance