Page:Ivoi - Jud Allan, roi des gamins.djvu/122

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en cet homme que je ne connaissais pas avant-hier.

Il eut un sourire navré :

— C’est fantastique. Tous mes sentiments vont maintenant à des inconnus.

Dans un soupir, il acheva :

— Linérès ! Allan !

Mais, d’un geste brusque, comme furieux du désarroi de ses pensées, il sonna. Au garçon accouru, il jeta cet ordre :

— Voyez si M. Allan peut me recevoir.

D’un ton tellement impérieux, que l’employé se précipita au pas gymnastique.

Pierre parcourait sa chambre d’un pas impatient. Deux, trois, cinq minutes s’écoulent. Le garçon ne reparaît pas. Enfin le voici.

— Est-il en état de me recevoir ? demanda le jeune homme se dirigeant déjà vers la porte.

— Non, monsieur, bredouille l’homme.

— Pas levé, à huit heures et demie ?

— Si si, monsieur, il est levé.

— Alors ?

— Alors, il a quitté, l’hôtel.

C’est un rugissement qui monte aux lèvres du marquis.

— Quitté l’hôtel, sans un mot… Mais quand ? Comment ? Qu’est-il arrivé ?

Il gesticule devant le serviteur effaré par sa nervosité.

— Parti cette nuit.

— Cette nuit ?

— Rentré à une heure… A réglé sa note…, fait porter ses bagages sur une voiture qu’il avait amenée.

— Et l’on sait où cette voiture l’a conduit ?

— Non, monsieur. La maison n’a pas l’habitude de surveiller ses clients.

Cela est évident. La question de Chazelet n’avait pas le sens commun. Du geste, le jeune homme renvoie le serviteur, puis il se laisse tomber sur un siège.

Il lui semble qu’avec Allan son dernier espoir de débrouiller la situation s’est évanoui.

Le contre-temps prend pour lui les proportions d’un malheur.

Que faire ? Que décider ? Ah ! Morand, Morand ! Insoucieux garçon, toi qui, à cette heure sans doute, te promènes, docte et important, dans les salles du Val-de-Grâce, tu ne te doutes pas que de toutes ces