d’appuyer la main sur son épaule ; il prononce cette phrase invraisemblable :
— Il n’y aura pas scandale. Il ne doit pas y en avoir ; car ce serait, je pense, mettre la police en mouvement et causer la mort des malheureuses victimes.
Est-ce qu’elle rêve ? Le frère de Lilian aurait-il pareil souci de ses intérêts ? Mais il reprend :
— Nul ne saura l’aventure si vous la taisez vous-même.
— Si je la tairai, moi ; vous pensez bien que, dans ma situation, j’aimerais mieux me couper la langue que donner le signal de ma ruine.
— Alors, vous expliquerez comme il vous plaira le départ de vos deux élèves.
— Pour Lilian, cela va tout seul, puisque vous avez la bonté de consentir… ; mais Grace Paterson a un père qui l’aime… Je ne veux pas dire que votre affection pour Lilian soit moindre… Mais M. Paterson peut être de moins bonne composition.
— Vous le prierez de demander une audience à M. Loosevelt.
— Au président ?
— Qui la lui accordera et lui donnera des explications telles qu’il se rangera à mon avis.
La curiosité, cette autre vertu de miss Deffling, l’incite alors à murmurer :
— Ne serait-il pas plus simple de me mettre à même de les lui fournir ?
— Non, répond sèchement le jeune homme, M. Loosevelt seul a qualité pour cela.
Puis, sans ajouter une parole, il tourne dos à miss Deffling et s’éloigne. Cinq minutes après, il franchissait le portail de l’avenue de Kendall, monologuant :
— La lettre mystérieuse, d’un ami celle-là, qui me parvint naguère sur le quai du Bois, me faisait cette recommandation : « Quoi qu’il arrive, ne désespère jamais. » Mon correspondant inconnu avait-il prévu cela ?
Et tristement :
— Suis-je réduit à l’impuissance totale ? Il est sûr qu’il me faut renoncer à l’appui de la police officielle… Oui… M. Loosevelt doit être avisé de suite… Mais me rendre à la Maison-Blanche serait imprudent. Mes ennemis savaient que, leur lettre reçue, j’irais à l’Institution Deffling. Par conséquent, dès ce moment je suis épié, je dois l’être…