Page:Ivoi - Jud Allan, roi des gamins.djvu/414

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Celle-ci lui apparaît un peu plus grande, plus svelte que tout à l’heure.

— Linérès, supplie-t-il, parlez-moi ; que j’entende votre voix.

Elle se tait. Il insiste :

— Oh ! vous pouvez parler sans crainte. Au milieu du vacarme qui nous entoure, nul ne saurait distinguer vos paroles.

Cela est vrai. Les invités sont parvenus au paroxysme de l’enthousiasme. Souhaits, clameurs admiratives se mêlent à des hurlements, des onomatopées gutturales.

Une voix, qui n’est point celle de sa fiancée, vient de murmurer :

— Je ne suis pas Linérès.

En même temps, sa compagne le contraint à reprendre sa marche un instant interrompue.

— Je prétends comprendre enfin, gronde-t-il.

Mais impérieusement celle qui s’appuie à son bras, ordonne :

— Silence ! On vous sauve l’honneur. Obéissez.

L’accent est si ferme, le verbe si autoritaire, qu’il se sent dominé par l’inconnue. C’est d’une voix suppliante qu’il demande :

— Mais Linérès ?

— Linérès est en sûreté.

Il semble que l’inconnue ait pitié de son angoisse, car très vite, la voix abaissée :

Mme de Armencita, transportée à la frontière, a accusé l’homme… Le télégraphe a joué… Sous deux jours, l’hacienda sera occupée par des forces policières… À présent, silence, le danger est partout. Linérès, seule, est à l’abri.

Jemkins et ses compagnons restaient bien loin en arrière.

Aux invités, les clameurs ne suffisaient plus. Des pièces d’artifices pétaradaient des deux côtés de l’allée, accompagnant la marche des fiancés d’une double haie flamboyante…

C’est ainsi que Chazelet et sa pseudo-fiancée parvinrent en ce point, où naguère Jemkins avait reçu la petite Lilian des mains de la servante Trina.

À droite du sentier se dressait le bouquet d’arbres, à l’abri duquel le Crâne avait attendu. À gauche, les aloès de la pulqueria, sous les éclairs des fusées, semblaient palpiter d’une vie monstrueuse.

Tout à coup, un pétard mal dirigé vint frapper la jupe de la compagne du marquis, une gerbe d’étin-