Page:Ivoi - Jud Allan, roi des gamins.djvu/45

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Et le singulier coupeur de bourses lui tendant une liasse de billets, il la prit sans se faire prier et la glissa dans sa poche.

— Tu ne comptes pas ? murmura le bandit.

— Non, j’ai confiance en mon… associé.

— Je t’en remercie… La confiance est réciproque… Tu partiras demain ?

— Oui… Mais la question de remboursement ?

— Attends. Lorsque l’on te remettra la somme que tu attendais, enveloppe-la dans une feuille de papier, et place-la sur la tablette de la cheminée de la chambre d’hôtel que tu occuperas.

— Bon, après ?

— Rien de plus. Elle me parviendra.

Cette fois, Pierre secoua la tête avec dépit.

— Mais je ne sais à quel hôtel je descendrai.

— Ne t’inquiète pas à ce sujet. Mon receveur la saura.

Puis, coupant court à la conversation :

— Deux de mes hommes vont te conduire jusqu’à l’entrée de Béjar. La fonda (hôtel) de Salamanca te recevra bien. Au matin, tu retourneras chez la señora Olinda, et ta dépense réglée, tu te dirigeras sur Avila, où tu prendras le train pour Paris.

Et d’un ton amical :

— Je te presse, mon ami, car j’ai peur que les ennemis de la jolie fleur de Armencita ne soient plus prompts à l’attaque que nous à la parade.

Deux bandits s’étaient déjà avancés, sans que Chazelet eût pu deviner comment le chef les avait désignés.

— Allez, prononça celui-ci, faites ainsi que je l’ai indiqué.

Après quoi, secouant cordialement la main du Français :

— Que les Saints Anges accompagnent ta marche. Adios !

Sans avoir le loisir de répondre, Pierre, entraîné par ses gardiens aussi irrésistiblement qu’à l’arrivée, se retrouva dans l’obscurité opaque du sous bois. Le feu, les bandits avaient disparu, et s’il n’avait senti des mains vigoureuses encercler ses poignets, il eût certes pensé avoir rêvé.

Mais le bois fut traversé, la route de Bânos fut descendue à une allure rapide. De nouveau, le jeune homme franchit le Cuerpo de Hombre.

Là, ses guides le quittèrent avec ses seuls mots :