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LE MAÎTRE DU DRAPEAU BLEU

Mais les réflexions furent brèves. Demeurer où ils se trouvaient, c’était consentir à mourir de faim, de soif… Quel que fût le danger inconnu, il fallait l’affronter, dût-on périr… Après tout une mort violente est préférable à la lente agonie… Et puis, dans le combat réside l’espoir de la victoire.

Instinctivement, sans se l’avouer, tous songèrent à Lotus-Nacré. Ils l’avaient plainte un instant plus tôt. La pauvre petite Nippone, surprise par le trépas foudroyant, n’avait pas connu leur anxiété présente. Son sort ne mériterait-il pas l’envie plutôt que la pitié ?

Joyeux et Miss Sourire s’étaient déjà accroupis devant l’ouverture signalée, et de leurs mains maigres ils grattaient le sol.

— Oh ! de l’eau a dû couler là, Maître, remarqua le gamin… Ce n’est pas du rocher, c’est de l’argile qui obstrue le passage.

— De l’argile ?

D’un même mouvement le Maître du Drapeau Bleu, le duc de la Roche-Sonnaille, s’étaient courbés auprès des enfants.

Oui, la déchirure du rocher apparaissait empâtée par un dépôt brun, friable, dans lequel ils reconnaissaient un limon déposé par les eaux.

— Au travail !

S’aidant de leurs mains, de leurs couteaux, de branches choisies au milieu de celles découvertes par le gamin, tous attaquèrent le « bouchon argileux ».

La besogne avança rapidement. En deux heures, ils avaient creusé une excavation de plus de trois mètres, où un homme pouvait se glisser.

Comme l’avait prévu master Joyeux, le conduit s’élargissait assez pour que les souples panthères y pussent circuler à l’aise, mais insuffisamment pour être praticable à un homme.

À mesure que l’on avançait du reste, le labeur utile diminuait, vu l’obligation de ramener en arrière les déblais de la fouille.

Vers minuit, heure indiquée par la montre de Lucien, tous, brisés, moulus, demandèrent au sommeil de réparer leurs forces. Leur première journée de captivité dans le sous-sol de la montagne avait pris fin.

Au réveil, deux sensations désagréables les attendaient. Ils souffraient d’une faim violente, la soif