Page:Ivoi - Le Message du Mikado.djvu/164

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— Ah ! vous êtes extraordinaires, vous autres, Parisiennes.

Il y avait dans ces mots de banalité courante une reconnaissance infinie.

Emmie le sentit. Elle se jeta au cou de sa compagne, et, tout en la couvrant de baisers, s’égrenant tels un chant d’oiseau :

— Le bonheur de tout le monde, voilà ma marotte… Même celui du sieur Midoulet. Lui non plus ne veut pas quitter votre père. Eh bien, voyez comme je suis bonne. Je vais lui assurer sa compagnie.

L’affirmation amena un rire perlé sur les lèvres de Sika. Mais, se calmant aussitôt la jeune fille reprit :

— Comment pourrai-je jamais m’acquitter envers vous, Emmie ?

— Oh ! bien aisé… Je vous appellerai ma cousine et je serai payée.

D’une pirouette, elle se mit hors de la portée d’une réplique, et interpellant le général :

— Vous savez que nous sommes immobilisés ici pour deux jours au moins.

— Comment cela ? gronda le Japonais, fronçant de nouveau les sourcils.

— Le mécanicien estime ce laps de temps nécessaire pour la réparation.

Et, avec une gravité imperturbable, les yeux fixés sur les mains de son interlocuteur qui se crispaient furieusement, la fillette ajouta :

— On partirait aujourd’hui si le canot n° 2 nous prenait à son bord.

Tibérade et Uko sursautèrent.

— Mais c’est le canot de cet assommant Midoulet !

Elle riposta, avec son habituelle-gaieté :

— Dame, il faut se servir au mieux des ennuis qui ne sauraient être empêchés.

— Cette petite est vraiment extraordinaire, s’exclama le général ; et s’apaisant comme par enchantement :

Qu’entendez-vous par nous servir de… ?

— J’entends, que le canot 2 marche plus vite que le nôtre ; qu’il nous escortera, bon gré, mal gré, jusqu’à Port-Saïd, et que si nous réussissons à lui échapper, ce ne sera que sur la terre égyptienne.