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Page:Ivoi - Le Message du Mikado.djvu/294

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Un lourd silence. L’Arabe prêtait l’oreille, espérant encore entendre les propos de la céleste messagère.

Au lieu de cela, il perçut l’organe d’Emmie, qui, s’étant débarrassée de son fragment de bois creux, avait repris d’emblée sa voix naturelle.

— Ô Prophète, ta lumière guidera ta servante, ta volonté sera ma volonté.

Elle se leva, s’approcha de l’oriflamme improvisée par la superstition des Arabes, flatta l’étoffe de même qu’elle l’avait fait tout à l’heure. Puis elle porta ses mains à ses lèvres, en un geste de mystique admiration.

En réalité, elle glissait dans sa bouche le tube de bois creux, si bien que de nouveau la voix de la houri retentit aux oreilles du factionnaire.

Elle disait :

— Tu partiras sans suite, sans compagnon, car ma protection sera sur toi. Ma force te donnera la force.

La petite cache son visage dans ses mains pour se débarrasser de la « pratique » et, de son organe naturel :

— Mais les compagnons qui reposent à cette heure sous la tente mise à ma disposition par le généreux Ramsès ?

— Ceux-là doivent être retenus ici jusqu’au matin, par la violence au besoin.

Et Emmie se prosterna, la face contre terre, clamant :

— Messagère du Prophète, il sera fait ainsi que tu l’ordonnes.

Kalfar la regardait, éperdu d’assister à cette jonglerie, qui pour lui, prenait la valeur de quelque rite merveilleux. Et sous les yeux du guerrier, obturés par la foi superstitieuse, l’adroite Parisienne retirait du vêtement les épingles recourbées qu’elle y avait implantées au début de la comédie. Ces épingles reliées par un fil noir, invisible dans la nuit, aux doigts agiles d’Emmie, étaient l’unique cause des mouvements du vêtement diplomatique.

Comme on le voit, le miracle était un simple tour de passe-passe, rappelant le jouet que les camelots vendent sur les boulevards de Paris et dénommé les danseurs parisiens.