Page:Ivoi - Le Message du Mikado.djvu/421

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— Je ne vous présente ni M. Pierre, ni Véronique, vous les connaissez beaucoup tous deux. Mais je veux dire qu’il est de moi l’engagé très véritablement aimé.

Et laissant ses interlocuteurs abasourdis, elle s’éloigna avec son fiancé, de l’allure compliquée et exquise d’une jolie femme, uniquement soucieuse de mettre en lumière les dons de charme dont la nature l’a gratifiée.

Après dix jours de navigation, le Dunlovan glissait sur l’eau paisible, longeant à moins de deux milles la côte orientale de Madagascar.

Les vigies avaient signalé les caps, formant l’immense baie de Diego-Suarez, située à l’extrémité nord de la grande île française.

La chaleur était torride.

Un soleil implacable dardait sur le pont des rayons ardents.

Équipage, passagers se mouvaient péniblement, accablés par une température d’étuve que n’adoucissait aucune brise.

Dans l’étroite zone d’ombre des cheminées du croiseur, Tibérade et Emmie, engourdis par la chaleur, regardaient d’un œil vague la côte qui se déroulait devant eux.

Parfois, ils élevaient paresseusement jusqu’à leurs yeux des jumelles marines, dont ils étaient munis, et alors ils s’oubliaient dans la contemplation du rivage, avec ses alternances de rochers, de grèves, de sable ocreux, de lagunes, limités par la forêt côtière, épaisse, continue, dominée par le parasol des palmiers.

— J’étouffe positivement, grommela soudain Tibérade.

Emmie fit entendre un petit rire cristallin.

— Si tu peux puiser une consolation dans cette idée, dis-toi que je suis tout à fait dans le même cas. Ces jambes de pantalon, que j’ai transformées en brassards, sont insupportables.

— Moi, je n’ai que le corps du pantalon, un caleçon inédit ; mais comme il me faut porter un second inexpressible, selon l’expression de mistress Honeymoon, pour dissimuler le premier, je cuis, je rissole.

Tous deux se toisèrent, les muscles zygomatiques