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Page:Ivoi - Le Radium qui tue.djvu/73

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reux entre les sourcils lui rappelaient qu’il s’était levé en mauvaises dispositions. Et, feignant de ne pas voir les deux causeurs, il déambula à petits pas, humant l’air salin, le plus merveilleux des toniques, sous l’influence duquel son malaise se dissipa rapidement.

Le steamer avait fait du chemin depuis la veille. Plus aucune côte n’apparaissait à l’horizon. Le navire, couronné du panache de fumée sortant en flocons pressés de ses énormes cheminées, occupait le centre d’un cercle immense de mer. Un léger clapotis agitait la surface des eaux et, sur les facettes des lames courtes, le soleil pâle, pâli encore par une brume impalpable, piquait des tons d’opale.

Du spectacle se dégageait une mélancolie mystérieuse.

Dick s’était arrêté. Il promenait autour de lui un regard vague, pivotant lentement sur lui-même, faisant face successivement aux divers points cardinaux. Son cerveau, incessamment en activité, cessait de bouillonner sous l’empire de la majesté tranquille de l’océan.

Tout à coup, il sursauta. Un projectile vivant venait de se ruer sur lui, il discerna Jean Brot, haletant, les cheveux ébouriffés, un effarement sur les traits. Il ouvrait la bouche pour s’enquérir de la cause d’un pareil émoi. Le gamin le prévint.

— On a volé mam’zelle Fleuriane !

Volé ! Le détective oublia tout le reste à ce seul mot.

— Que lui a-t-on volé ?

— La boîte qu’on a apportée hier, un peu avant le départ.

— Le coffret aux corindons !

Dans les yeux de Fann s’alluma une petite lueur, mais ce fut rapide comme l’éclair. Il avait repris une physionomie indifférente quand il questionna :

— Comment cela s’est-il passé ?

— Je n’en sais rien. Je m’étais habillé. Je sors de la cabine, v’lan, je tombe dans le capitaine, dans les matelots, dans les stewards. Toutes les « rues » (on désigne ainsi les couloirs des cabines à bord des paquebots), étaient pleines de monde, mam’zelle Fleuriane s’était aperçue du vol. Elle avait appelé…

— A-t-on des soupçons ?

— Quels soupçons voulez-vous qu’on ait ? La cas-