Page:Ivoi - Le Serment de Daalia.djvu/14

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

lerie… Une bonne action avant d’exécuter le grand saut dans l’autre monde…

Il consulta sa montre :

– Deux heures nous restent, c’est suffisant.

Morlaix s’inclina. D’un ton insouciant, il murmura :

– Ton fidèle valet de chambre te suivra aussi bien pour conquérir le prix Montyon que pour accumuler les sottises.

Cependant, Baptiste s’empressait au service du cabinet 26.

L’astucieux garçon avait eu un sourire réjoui, qles clients de ce « numéro » lui avaient enjoint de disposer tout le repas sur une table de desserte, et de ne les plus déranger. Vers l’angle où était établi le microphone aboutissant au 24, il avait levé un regard empreint d’espérance ; après quoi, il avait enveloppé ses clients d’un coup d’œil tendre.

Ils étaient trois.

Deux hommes et une jeune fille.

Gros, gras, court, le torse ramassé, l’abdomen ballonné, la face large, le premier représentant du sexe fort portait, malgré son embonpoint, une de ces physionomies dont il est impossible de préciser l’âge, encore que les cheveux rares, les favoris poivre et sel permissent d’affirmer que, depuis longtemps, il avait franchi les limites de la première jeunesse.

Son compagnon accusait environ vingt-cinq ans. Pas vilain garçon, mais fade avec sa chevelure d’un blond filasse, ses yeux d’un bleu de porcelaine, son visage effacé, dépourvu d’expression. On sentait en lui un de ces êtres neutres, dont la vie n’est qu’un reflet, dont l’action n’est jamais que le résultat de la poussée d’une volonté étrangère.

Ni intelligent, ni sot ; ni bon, ni mauvais ; également éloigné de l’affection et de la haine, de l’honneur et de la honte, du courage et de la lâcheté, de la foi et de la négation, ce personnage constituait un parfait échantillon de ces nullités qui pullulent et qui voilent leur incapacité, leur impuissance de vibrations généreuses, en raillant lourdement la beauté, la grandeur, l’enthousiasme, en un mot ce qui fait l’individualité noble, la nation admirable. Ces êtres s’inti-