Page:Ivoi - Le Serment de Daalia.djvu/316

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Rien de tout cela n’arrêta les arrivants.

Des fenêtres de l’osteria, on pouvait sans peine assister aux allées et venues sur l’embarcadère des paquebots. Cette considération était d’ordre trop supérieur pour que l’on ne passât pas outre à la guitare, aux cigarettes de l’hôtelier et au doigt nasal de Serafina.

Tous s’installèrent tant bien que mal.

Puis Fleck qui, par parenthèse, aimait s’isoler, s’enferma dans sa chambre. Niclauss, que les plaisanteries des Français avaient le don d’exaspérer, suivit cet exemple.

Pour Albin, son âme était trop remplie de sentiments contradictoires pour qu’il ne cherchât point la solitude, qui seule, permet les longs entretiens avec soi-même.

Morlaix et Lisbeth se trouvèrent donc abandonnés dans le patio, cour intérieure assez malpropre, où une fontaine en ruines rappelait qu’autrefois un jet d’eau limpide avait dispensé la fraîcheur en ces lieux.

— Si nous faisions une promenade, proposa Morlaix.

Lisbeth désigna de la main un grenadier en fleurs, dont les branches se penchaient curieusement par-dessus les murailles :

— Il répond pour moi, fit-elle en rougissant.

— Avec plaisir, dit le grenadier, je crois, interrogea le jeune homme.

Et la petite Allemande murmura :

— Oui, il dit cela, et moi aussi.

— Alors en route.

Sur ce, tous deux sortirent. Par les quais, par les ruelles, tantôt resserrées entre les maisons, tantôt bordées de murs qui semblaient supporter les voûtes de feuillages s’arrondissant au-dessus de la tête des promeneurs, tous deux allaient, enchantés d’être ensemble et seuls.

Oh ! ils ne médisaient point du prochain, ils parlaient d’eux-mêmes, de ce présent charmant, de l’avenir plus charmant encore, et cela avec une satisfaction extrême, car ces deux êtres que l’affection avait amenés à se comprendre, éprouvaient un besoin toujours renaissant de prononcer chacun des phrases louant l’autre.