Page:Ivoi - Le Serment de Daalia.djvu/374

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— Point ! je porte une lettre que m’a donnée le chef.

— Une lettre… Mais tu te trompes, la poste est à Manille et tu t’en éloignes.

— Je ne vais pas à Manille.

— Ah bah !

— Il paraît que le nom tracé sur l’enveloppe intéresserait trop les fonctionnaires américains.

— Quel nom ?

— François Gravelotte.

Antonio demeura muet. Il comprenait. Lopez était porteur de la lettre écrite par Daalia sur l’ordre de Moralès.

— Au revoir, Anton’, je n’ai pas le temps de m’arrêter.

Ces mots secouèrent le métis d’un frisson.

Cette lettre, c’était le message de misère, c’était l’avenir assombri pour la jeune fille.

Et, brusquement, le Philippin murmura :

— Il ne faut pas un nuage sur la vie de celle qui a eu pitié de toi.

Il se leva d’un bond.

— Je t’accompagnerai un peu, Lopez ?

— Si tu le veux.

— Je m’ennuie, et puis tu m’intrigues, par tous les saints !

Les deux partisans marchaient à présent côte à côte.

— Qu’est-ce donc qui t’intrigue ? reprit Lopez au bout d’un instant.

— C’est de savoir où se trouve le bureau de poste vers lequel tu te diriges. Je n’en connais pas de ce côté.

— Il y en a un cependant à la baie de San Benito.

— Tu plaisantes, je pense. Pas une habitation autour de la baie.

— Non, mais un navire. 

— Un navire ?

— Et de guerre encore. Un croiseur de la marine russe, le Varyag.

Le visage bronzé d’Antonio exprima une surprise évidente. Il considéra son compagnon et lentement.

— Ce Varyag prendra ta lettre ?

— Oui.

— Pourquoi ?