Page:Ivoi - Le Serment de Daalia.djvu/386

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— Tu lui as dit : Je prendrai à mon bord ceux des tiens qui voudront quitter cette île ensanglantée.

— Je l’ai dit en effet, et je suis prêt à tenir mon engagement.

— En ce cas, envoie une chaloupe dans la baie de San Benito. J’y prendrai place et je guiderai tes matelots vers l’asile de ceux qu’ils auront à ramener.

— Combien sont-ils ?

— Huit, dont quatre femmes.

— Des chulas, peut-être. Je ne puis les admettre.

— Non, pas des chulas, mais des señoras d’Europe.

— Comment se trouvent-elles là ? Pourquoi ne s’embarquent-elles pas à Manille ?

— Cela, je l’ignore. Moralès n’a pas cru bon de m’instruire, jugeant sans doute que tu ne questionnerais pas. Parole donnée doit être tenue sans discours.

Le capitaine fronce les sourcils, mais il s’apaise aussitôt.

— Le règlement des navires de guerre interdit la présence de femmes à bord ; mais j’ai engagé mon honneur, je recevrai les reproches mérités pour l’infraction à la règle que je vais commettre.

Et, s’adressant à l’officier de quart :

— Le grand canot à la mer, je vous prie. Cet homme donnera la direction. L’embarcation ramènera huit passagers, dont quatre dames. Il faut ménager des cabines.

L’interpellé a un geste de surprise. Des passagères à bord, et le règlement ? dit le geste. Mais bien vite, il reprend l’attitude correcte, salue son chef et donne les ordres nécessaires.

— Et toi, reprend le capitaine, brave Antonio ?

— Moi, je ne compte pas. Je suis un homme des bois. Une place sur le pont me suffit

— Tu accompagneras donc…

— Les autres. Oui, si tu le permets. Je ne t’embarrasserai pas longtemps.

— Tu comptes me quitter à la première escale.

Le partisan leva les yeux vers le ciel et d’un ton étrange :

— La première escale… Oui… peut-être.

Plus tard, l’officier devait se souvenir de cette intonation singulière. Pour l’instant, son attention