Page:Ivoi - Le Serment de Daalia.djvu/430

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pour épargner aux autres les maux de la guerre.

— Alors, serrons-nous la main, car il est probable que nous ne nous reverrons pas.

— C’est probable, en effet.

Ces deux héros, qui, si simplement, venaient de faire le sacrifice de leur vie, se tendirent la main.

Une étreinte rapide, un mot admirable dans sa concision :

— Adieu !

Et le lieutenant de vaisseau descendit dans le canot qui l’avait amené, regagna la canonnière Koreietz, dont les cheminées soufflant une fumée noire annoncèrent bientôt que, lui aussi, avait fait allumer les feux.

Un croiseur, dont le pont était à peine protégé, une canonnière en bois, allaient attaquer quinze navires de guerre.

À eux deux, ils déplaçaient sept mille cinq cents tonneaux et portaient : deux canons de vingt centimètres, treize de cent cinquante millimètres, quatre de dix centimètres et vingt pièces légères.

L’ennemi, lui, pour un déplacement de cinquante mille tonneaux, pouvait riposter par quatorze pièces de trente-cinq centimètres, dix-huit de deux cent soixante millimètres, soixante de cent soixante-quinze millimètres, quarante-quatre de cent cinquante et cent douze pièces légères. Soit deux cent quarante-huit canons avec des calibres supérieurs, contre trente-neuf.

Les chiffres ont une terrible éloquence.

Eh bien ! à cette heure où allait commencer une des plus admirables Marches à la Mort que l’Histoire ait jamais enregistrée, le commandant du Varyag ne plaignait ni lui-même, ni son équipage.

Les marins russes mourraient pour la patrie.

Mais il s’apitoyait sur Albin, sur Daalia, sur ces deux êtres de tendresse que la cruauté jaune vouait au trépas.

Il avait fait appeler les jeunes gens. Il leur avait dit l’impérieuse nécessité qui le contraignait à les entraîner dans la fournaise, ou à livrer la jeune fille au sacrificateur Oraï.

Les fiancés s’étaient regardés. Il y avait eu un désespoir, une souffrance surhumaine dans leurs yeux ; puis, la fille de François Gravelotte avait murmuré :