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Page:Ivoi - Les Semeurs de glace.djvu/107

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lui maintenant par toute l’épaisseur du siège qu’Elena avait abandonné.

Ses sourcils froncés, son air sombre surexcitèrent la gaieté de sa compagne, et, par ricochet, celle de la demoiselle de compagnie.

Enfin, la forte personne parvint à contraindre ses muscles zygomatiques au repos, et d’une voix essoufflée :

— Vous avez la gaieté, Miss, dit-elle.

— Oh oui !

— Je comprends cela ; moi-même je suis toujours dans le rire.

— Le monde est si plein de choses comiques.

L’Anglaise opina du bonnet et d’un ton prétentieux :

— Des choses qui échappent au vulgaire ; mais que l’observateur attentif saisit au vol.

La remarque, émanant de cette grosse femme, chargée sans le soupçonner d’un repas complet était irrésistible.

De nouveau, Stella fut secouée par le fou rire.

De nouveau, Mable joignit son bourdon aux notes cristallines de sa voisine. S’encourageant réciproquement, toutes deux se tenaient les côtes. On ne sait comment aurait fini cet assaut hilare, si un nouvel acteur n’était entré en scène.

Acteur à quatre pattes qui jouissait des bonnes grâces de tous les passagers, et pour tout dira d’un mot, un chien.

Oh ! pas un chien ordinaire, loin de là.

Tout d’abord, Nieto (petit-fils), tel était le nom du quadrupède, Nieto appartenait au capitaine, maître après Dieu à bord du paquebot, et l’on conçoit qu’il empruntait à cette haute caution une respectabilité particulière.

Secondement, Nieto était une bête de race, un de ces purs yucatanos, au pelage feu, qui chassent avec un égal courage les salteadores (voleurs) ou les fau-