Dans le réticule éventré apparaissait une bouteille de vin gisant dans une innommable purée de pâté, de gâteaux, de fruits.
Elena avait commencé à se lamenter sur son sac déchiré, mais la voix lui manqua en reconnaissant les objets dont il était rempli.
Quant à miss Mable qui, non sans peine, était parvenue se mettre sur son séant, elle roulait des yeux effarés.
Enfin Elena récupéra la faculté d’exprimer sa colère.
— Que veut dire ceci, Grâce ? fit-elle sévèrement.
L’interpellée étendit ses gros bras tremblants à droite et à gauche.
— J’allais vous le demander, chère mistress.
— Prétendez-vous affirmer que vous l’ignorez ?
— Oh ! oui ; il faut que le diable se soit mis dans cette affaire.
La jolie blonde frappa du pied, l’intensité de son courroux ayant enfin raison de son flegme.
— Le diable ! Vous avez dit le mot. Il faut être possédée de Satan, pour être aussi énormément gourmande.
— Gourmande ? répéta Mable absolument médusée par cette accusation.
— Comment qualifiez-vous autrement votre conduite. Vous avez à peine fini de déjeuner, et copieusement, j’ose le dire.
— Oh ! comme un petit oiseau…
— Laissez donc, un petit oiseau qui conduirait un hippopotame à la mort par indigestion.
— Hippopotame ! glapit Mable révoltée.
— Yes, et vous utilisez mon réticule en façon de garde-manger.
— Moi ?
La figure bouffie de la demoiselle de compagnie était du plus haut comique. Elle exprimait l’ahurissement confinant à la folie.