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Page:Ivoi - Les Semeurs de glace.djvu/12

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— J’ai senti mon personne devenir le papa de lui-même.

— Nous l’avons emmené, cajolé…

L’Italien baissa la voix :

— Jé mé dis alors : Candi, té voilà père.

L’Anglais joignit les mains :

— Je adressai à moi, citoyen britannique, le même speech.

— Tu peux pas, continua Candi, obliger ce doux ange à mener la vie précaire, poverissima, que tu mènes avec ton ami Crabb.

Crabb secoua derechef la main de son compagnon.

— Ce que vo disiez, Candi, est droit.

— Tou l’as compris de suite, Crabb.

— Yes. Et on a mis le boy à l’école.

— Puis au lycée.

— Ensuite à Polytechnique.

— Et comme cela coûtait plous cher, dé plous en plous, on a émigré au Brésil, où le signore de Avarca paie royalement ses dévoués compagnons.

Candi s’interrompit brusquement :

— Silence !… Voici le signore qui descend… Silence !

Quatre personnages se dirigeaient vers les causeurs, suivant une sente étroite, qui zigzaguait sur la croupe du mont Pelé et traçait sa ligne sinueuse du bord même du cratère jusqu’à un ponceau de bois, jeté en travers de la rivière Blanche.

En tête marchait un homme d’une trentaine d’années, de taille haute et élégante, vêtu avec cette recherche un peu théâtrale des créoles sud-américains.

Et de fait, le señor Olivio de Avarca eût paru à des yeux européens mériter l’épithète de créole (blanc sans mélange), bien qu’une légère teinte dorée, répandue sur la matité de son teint, décelât l’origine métisse du personnage.

Quoi qu’il en soit, il était remarquablement beau, avec ses dents blanches, sa bouche petite, encadrée