Aller au contenu

Page:Ivoi - Les Semeurs de glace.djvu/164

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Moi. Pouvez-vous le croire ? Bien où contraire…

— Alors, c’est entendu. Une voiture viendra prendre vos bagages avec les nôtres cette après-midi.

Puis, enchanté de sa négociation, Massiliague prit congé, laissant Jean, Stella et bientôt Ydna dans la plus étrange perplexité.

Certainement, l’ingénieur et Mlle Roland n’avaient rien à redouter du voisinage du Marseillais ; mais, pour voyager avec lui, ils devraient se séparer d’Ydna.

— Bah ! disait celle-ci, l’important est que j’échappe à ces amis trop dévoués. Partez, j’irai de mon côté.

Mais Stella refusait. Elle s’était mise à aimer tendrement la prêtresse ; elle la considérait à l’égal d’une sœur, et la séparation lui serait un déchirement.

Tandis qu’elle prononçait ces paroles, ses grands yeux se fixaient sur ceux de Jean. Ils semblaient dire :

— Empêchez qu’elle s’éloigne de nous. Si nous la perdons de vue, une voix intérieure me crie que nous ne parviendrons plus à la sauver de la mort horrible à laquelle elle marche avec tant de courage.

À ce moment même, une sonnerie lugubre retentit sur la place. Par la fenêtre, les causeurs aperçurent un tombereau recouvert d’une bâche noire ; à l’avant flottait un drapeau jaune.

— Des victimes de la fièvre jaune, soupira Ydna.

— Quoi, cette charrette ?

— Emporte à leur dernière demeure ceux qui ont succombé.

— Oh ! l’horrible fléau !

Mais Stella s’interrompit, stupéfaite. Jean riait, monologuant :

— Bravo ! Enfoncé l’aigle de Marseille. Vive la fièvre jaune ! Si elle n’existait pas, il faudrait l’inventer.