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Page:Ivoi - Les Semeurs de glace.djvu/173

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LES SEMEURS DE GLACE

En même temps, le claquement sec d’un revolver armé expliquait le sens des paroles.

— Vé, mon brave, je dois m’embarquer tout à l’heure.

— Impossible.

— Mes affaires l’exigent, ma caille.

— Elles attendront.

— Eh qué, vous faites erreur. Il n’y a pas de fievre jaune dans l’hôtel.

— La sanite (commission de docteurs) viendra demain matin ; elle décidera. En attendant, rentrez.

— Mais…

— Ou sinon…

Lopez se retourna vers ses hommes :

— Attention ! en joue !

Dix revolvers menacèrent la poitrine du Marseillais.

— Troun de l’air, grommela celui-ci en regagnant bien vite l’abri de la porte, ces gensses ont une éloquence irrésistible.

De sa démarche, en tout cas, résultait la certitude que, jusqu’au lendemain matin, personne ne serait admis à quitter la fonda.

Or, comme, après tout, Massiliague tenait moins à s’embarquer de suite qu’à ne pas perdre de vue Jean et Stella, il revint paisiblement à sa chambre, où il s’enferma avec Francis, Pierre et Marius.

— Mes bons, leur dit-il, la peste jaune qui fait souffrir les autres, nous procure quelques heures de repos. Pas plus que nous, les jeunes gensses ne peuvent abandonner l’hôtel. Les vigils veillent pour nous. Donc dînons bien et dormons mieux, eh ! va la tartane.

Son conseil fut suivi.

De la chambre du bouillant Méridional, le calme se répandit par tout rétablissement. Clients, employés, cuisiniers, garçons, chasseurs, masseurs, baigneurs, se soumirent philosophiquement à la loi.