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Page:Ivoi - Les Semeurs de glace.djvu/18

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— Ce fils que le hasard d’une étape nous a donné, allons-nous le condamner à la misère que nous traînons ?

D’une commune voix, ils avaient répondu :

— Non, nous en ferons quelqu’un, ou tout aumoins quelque chose.

Comme on le voit, Crabb et Candi avaient des cœurs de père.

Jean fut mis à l’école. D’une intelligence très ouverte, curieuse de science, il fit l’admiration de ses maîtres, qui conseillèrent aux « papas » de l’excellent élève de le « pousser », en d’autres termes de le mettre au lycée.

Jean entra à Louis-le-Grand, à Paris. Ses pères adoptifs volèrent un peu plus, pour payer les années de collège.

Jean passa ses deux baccalauréats. Attiré par les merveilles de la science moderne, il exprima le désir, de faire des mathématiques spéciales, puis d’entrer à Polytechnique.

Crabb et Candi pleurèrent de joie.

Mais, songeant que leur existence nomade les exposait à maint démêlé avec la justice, que leur célébrité particulière pourrait nuire à la carrière de leur fils bien-aimé, ils quittèrent la France et vinrent opérer en Amérique, d’où les termes de la pension arrivèrent toujours avec là plus parfaite régularité.

Jean les croyait occupés à l’extraction de l’or d’un placer, voisin de la rivière de Guyane, l’Oyapok… Eux avaient rencontré le señor Olivio de Avarca, frère du gouverneur de la province brésilienne d’Amazonas, et qui, pour des raisons encore ignorées de ses subordonnés, avait réuni une troupe d’aventuriers de toutes nationalités, dont chacun avait sur la conscience assez de méfaits pour être pendu dix fois.

Le señor payait largement… Jean terminait brillamment ses études… Crabb et Candi se frottaient las mains.