Pedro s’était levé :
— Señorita, vous faites erreur, s’écria-il. Celle dont vous parlez a été légalement condamnée.
— Légalement, oui ; justement, non.
— Prétendriez-vous incriminer la bonne foi des magistrats ?
Ydna secoua la tête. Toute l’assistance s’était dressée, prise au cœur par ce duel étrange qui s’engageait entre le premier fonctionnaire de l’État et une jeune fille, inconnue tout à l’heure.
— Les magistrats ont été trompés, déclara celle-ci.
— Trompés ?… Encore faudrait-il en apporter la preuve.
— Je suis venue annoncer cette preuve.
— Mensonge ! rugit Olivio, à qui la terreur fit oublier toute prudence.
Un grondement menaçant parcourut la salle.
— Silence, je vous en prie, implora la prêtresse.
Et la foule, obéissante, s’apaisa.
— Cette preuve vous sera donnée demain. La garrotta refusera d’exécuter la victime innocente.
Il y eut un frémissement général. Enclins au merveilleux, les Sud-Américains étaient profondément impressionnés par cette prédiction faite d’une voix grave.
Est-il bien sûr d’ailleurs que, dans le Paris sceptique, pareille affirmation rencontrerait beaucoup d’incrédules ?
— La divinité marquera ainsi sa tendresse pour la victime, sa volonté de la voir vivre.
Et après une nouvelle révérence :
— Voilà ce que Dolorès Pacheco était chargée d’annoncer aux habitants de Sao-Domenco.
— Un miracle ! clama un spectateur.
— Un miracle ! redit la foule.
— C’est la Madona qui veut sauver la condamnée.
— La Madona ne se trompe jamais.
Dolorès, insouciante du tumulte, se dirigea vers l’endroit par lequel elle était parvenue à l’avant-scène.
— Elle va s’échapper, hurla Olivio, qu’on l’arrête !
— L’arrêter ? gronda le public.