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Page:Ivoi - Les Semeurs de glace.djvu/380

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— Bonzour, figlio, murmura une voix connue, tou té proménés dé grand matin. Tou né comptais donc pas sur moi ?

— Si, si, mon bon Candi, mais qu’as-tu fait ?

— Eh bien, caro, zai engazé la conversazione avé les aides du bourreau. Zé les ai même aidés oun poco.

— Et tu as trouvé le moyen de les éloigner ?

— Zé l’ai trouvé… dépouis vingt ans. Cé moyen-là, il réoussi touzours. Zé leur ai proposé dé vider boteglia, leur travail terminé.

Candi s’interrompit :

— Ils ont finito, ils mé cherchent. Zé vais les retrouver. Dans oune couple dé minutes, plous personné né gardera la garrotta. Adio.

En courant, il rejoignit l’équipe des aides, et Jean perçut ces paroles :

— Que, mé voici, amici, la boteglia s’est pas envolée. Vénez vider lé verre. Zé souis enchanté d’avoir vu dé près cette machine, qui va pounir la petite espiègle qui m’accusait d’être oun bandit. Oun banditto, moi !

Des pas lourds sonnèrent sur la place.

Tous les aides, ravis de rencontrer un étranger aussi courtois, suivaient Candi vers une maison basse, sur la façade de laquelle on lisait ces mots :

Licores, Vinos et tot Bibeïas.


correspondant à l’enseigne française :

Liqueurs, Vins et toutes Boissons.

Un filet de lumière, filtrant par l’entre-bâillement de sa porte, démontrait que le débitant prévoyant était aux ordres des clients, malgré l’heure matinale.

Tous s’engouffrèrent dans la refrescao casa (maison de rafraîchissement). La garrotta n’avait plus de gardes. Jean eut un geste joyeux, ses regards se levèrent vers le ciel, avec une expression de fervente gratitude, puis se fixèrent sur les croisées de l’une des maisons les plus voisines de l’échafaud.