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Page:Ivoi - Les Semeurs de glace.djvu/381

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— Olivio dort encore, murmura-t-il. Dieu permet que le sommeil visite le criminel, pour lui cacher ceux qui combattent en faveur de l’éternelle justice.

Glissant sans bruit sur les pavés pointus, dont la chaussée était formée, il se rapprocha de l’instrument de supplice.

Sa main décrivit dans l’air un geste circulaire.

Un choc léger, une sorte d’énorme soupir, analogue à la déflagration de la poudre brûlant en plein air, traversèrent le brouillard.

Puis, soudain, un grésillement semblable à celui du bois que lèche la flamme, des craquements secs, succédèrent.

Vivement l’ingénieur s’était jeté sous la voussure d’une porte, appuyé au mur, faisant corps avec l’obscurité.

Mais le silence se rétablit.

Sans doute les buveurs, enfermés chez le débitant, n’avaient rien entendu.

La réflexion était juste, car Candi, sous le prétexte qu’un magistrat noctambule, ou un scribe du tribunal, ou encore un homme de police, eût pu apercevoir les aides et critiquer leur soif, avait fait passer les compagnons dans une arrière-salle, où il s’était soigneusement enfermé avec eux.

Rassuré par le calme qui continuait à régner, Jean s’approcha de la garrotta, jusqu’à toucher les bois. Il examina attentivement la machine sur laquelle s’étaient exhalés les derniers soupirs de tant d’agonisants, puis il murmura :

— Parfait !

Rasant les maisons, il contourna la place pour disparaître bientôt dans la caes dos Soldados.

Insensiblement, le jour perça la couche de vapeurs.

Sous les premiers rayons du soleil, le brouillard s’était levé peu à peu, avait plané un instant au-dessus de la ville, puis se déchirant en longs filaments, s’était évanoui.

Les fenêtres de l’appartement d’Olivio, largement ouvertes, laissaient apercevoir les visages de l’haciendero et de ses invités.

Pedro, Alcidus étaient là.