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Page:Ivoi - Les Semeurs de glace.djvu/382

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Autour d’eux se groupaient Massiliague, Kasper, José, Cristino, Crabb et Candi lui-même, arrivé bon dernier.

Sur la place, un escadron de lanceros, la lance fichée à la botte, les flammes vertes et jaunes (couleurs du pavillon brésilien) flottant à la brise matinale, entouraient les bois de justice, maintenant la foule.

Toute la population de Sao-Domenco, femmes, enfants, se mêlait aux peones, aux ouvriers, aux arrieros. Les negocies (commerçants) coudoyaient les caviaoës (gens de haute naissance, de grande richesse). Quelques gambusinos auroes (chercheurs d’or) ou jemmios (chercheurs de diamants) circulaient parmi les groupes.

Chacun parlait, donnait son appréciation sur le spectacle cruel que tous s’étaient dérangés pour voir.

Pour les habitants de la petite cité, où les distractions sont rares, l’exécution de Stella prenait les proportions d’une grande première.

Si l’on ajoute à cela que la condamnée était femme adorablement jolie, on comprendra que beaucoup parmi les spectateurs se sentissent émus. Leur pitié enfin avait été singulièrement accrue par les récits des personnes qui, la veille au soir, avaient assisté à la représentation théâtrale.

Au surplus, l’esprit du peuple était tout préparé en faveur de la condamnée.

L’arrêt du tribunal n’avait pas satisfait tout le monde.

Beaucoup avaient subi l’ascendant de la noblesse de Stella, de la dignité avec laquelle la jeune fille avait vainement tenté de faire triompher la vérité.

— Enfin, on va donc étrangler cette calomniatrice, dit un élégant jeune homme, fils d’un riche haciendero des environs.

— Eh ! l’homme aux franges d’or, clama un robuste gambusino faisant allusion à la bordure dorée de la ceinture du causeur, es-tu bien sûr que cette jeune fille ait calomnié le riche Olivio de Avarca ?

— Parbleu ! Un homme dans sa position ne devient pas criminel.