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Page:Ivoi - Les Semeurs de glace.djvu/61

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lourdement avec la grâce obèse d’un éléphant. Toutes deux s’étaient arrêtées en face du lieutenant et agitaient leurs billets.

— Miss Mable Nice, expliqua mistress Elena, est mon petit dame de compagnie.

À cette affirmation, l’officier ne put entièrement réprimer un sourire. Le petit dame de compagnie représentait au bas mot, huit fois le volume de sa maîtresse.

Toutefois, refrénant sa gaieté irrespectueuse, le chef de section prit les tickets, les parcourut du regard, puis se tournant vers les matelots, préposés à la manœuvre de la passerelle :

— Laissez passer.

Les Anglaises se glissèrent aussitôt entre les soldats et gagnèrent le pont, tandis que les groupes restés sur le quai rugissaient de rage et de désespoir.

Soudain le silence se fit.

Civils et militaires regardèrent avec étonnement un jeune homme et une jeune fille, qui s’avançaient doucement, suivis par un âne, chargé d’une caisse et conduit par un nègre.

Des quolibets s’élevèrent

— On refuse le passage aux personnes, osera-t-on l’accorder à un bourriquot ?

Les nouveaux venus ne parurent point entendre. Le jeune homme présenta ses tickets au lieutenant qui lut : « M. Jean, ingénieur ; Mlle Stella Roland, cabines 3 et 5. »

— Laissez passer, dit-il.

Des matelots empoignèrent la caisse que portait l’âne.

— Ceci dans la cabine 3, indiqua Jean.

Sur quoi, le nègre et son âne s’éloignèrent le long du quai, tandis que l’ingénieur et sa compagne prenaient pied sur le steamer.

Ah ! ils avaient eu peine à arriver jusque-là, avec