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Page:Ivoi - Les Semeurs de glace.djvu/94

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— Vraiment ? fit gaiement Stella en considérant sans envie l’opulente carrure de la demoiselle de compagnie.

— Oui, en vérité, miss, car la part d’appétit qui m’est dévolue conviendrait à un mignon passereau, à une bergeronnette.

— Une bergeronnette de la société des cent kilos, grommela Pierre, attablé en face de la grassouillette personne.

Sans doute la réflexion était dans l’esprit de tous. Toutes les physionomies s’éclairèrent d’un sourire, et Scipion lança entre deux coups de dents :

— , ça n’est pas comme moi ; mon appétit, il rendrait des points à celui d’un jaguar.

Et les répliques de se croiser :

— En mer, on mange toujours beaucoup.

— Influence de l’air salin.

— Salin et pur ; l’air exempt de microbes.

— C’est évident. Si les grandes villes jouissaient d’une atmosphère semblable, l’humanité ignorerait la dyspepsie.

À cette remarque, énoncée par le docteur du bord, tous les convives se tournèrent vers le praticien.

— C’est votre avis, docteur ?

— Absolument, reprit ce dernier, flatté de l’attention dont il était l’objet. Vous savez, señoras et señors, que la dyspepsie, comme ses maladies consécutives, obésité, arthrite, etc., proviennent surtout d’une oxygénation insuffisante…

Le médecin était lancé.

Profitant de l’attention générale, Stella, après s’être assurée qu’aucun des stewards de service ne l’observait, fit glisser prestement une bouteille de bourgogne sur ses genoux, et l’introduisit à tâtons dans son réticule, suspendu, on s’en souvient, au dossier de son fauteuil mobile.

Après quoi, elle parut prodigieusement intéressée par la conférence que le docteur, sons pitié pour les