Page:Ivoi - Massiliague de Marseille.djvu/144

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De nouveau Massiliague et Marius s’entre-regardèrent. Le soupçon vague du Marseillais prenait corps. Bell était le nom du visiteur inconnu dont la visite avait décidé le « champion » à quitter le logis Coldjam. Et cet homme se rendait précisément dans la bourgade qui était le but du voyage de Scipion.

Ce dernier cependant maîtrisa son émotion et affectant un ton indifférent :

— Ne t’occupe plus de cela, pitchoun, voici tes vingt dollars. J’ai la liste complète des passagers sauf un, cela n’a aucune importance.

Le nègre empocha les pièces d’argent avec une évidente satisfaction et se retira.

— Que décide Monsieur ? demanda respectueusement Marius.

— Eh ! Dioubiban, je veux m’assurer de l’identité de ces deux hommes. Je sens redoubler mes inquiétudes, depuis que le moricaud, il nous a fourni ses renseignements.

— Oui, mais le moyen ?

Un instant, Massiliague parut réfléchir. Enfin il releva la tête :

— Cette nuit, tout le monde dormira.

— C’est à présumer.

— Eh bien, ma caille, moi je ne dormirai pas, et le diable sera bien contre moi, si je ne parviens pas à voir le faciès de ces mystérieux voyageurs.

Sa résolution prise, toute anxiété disparut du visage du Marseillais. Il dîna de bon appétit, s’enquit auprès du steward de l’heure approximative de l’arrivée à Oklahoma ?

— À quatre heures vingt du matin, répliqua l’employé.

— Il fera encore nuit ?

— Oui, gentleman, en ce moment le jour ne se fait qu’à cinq heures.

— Bien, merci.

Et, se tournant vers Marius, Scipion conclut en baissant la voix :

— Les ténèbres seront pour nous. Si ces inconnus nous poursuivent, nous aurons une chance de plus de leur glisser entre les doigts.

Mais le Texien secoua la tête :

— Je ne le pense pas, je demande pardon à Monsieur d’exprimer un avis opposé au sien : seulement tout à l’heure j’ai interrogé le chef du train.