Page:Ivoi - Massiliague de Marseille.djvu/155

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uniformément accélérée, continue à filer dans les ténèbres.

— À Oklahoma, s’écrie encore le « champion de l’indépendance sudiste ».

Puis, suivi pas à pas par son domestique enthousiasmé, il s’élança au pas de course dans la direction d’Oklahoma-station que son équipée a mise en révolution.

Chefs, agents, facteurs, buralistes, tous se pressent affolés sur les quais, discutant, pérorant. Le train de quatre heures vingt est fou, c’est-à-dire qu’il semble abandonné à lui-même, puisqu’il n’observe plus les indications de l’horaire.

On télégraphie aux stations voisines.

Puis l’on donne carrière aux imaginations inquiètes.

Les agents de la machine sont-ils morts ?

Des Indiens nomades ont-ils attaqué le train ?

Interrogations aussi inutiles qu’anxieuses. Ceux qui seraient en mesure d’y répondre ne s’en soucient guère.

À travers champs, Massiliague et le Texien ont gagné la ville. Tout dort. L’émoi du personnel de la gare n’a point troublé le repos des habitants. Petite est la cité ; aussi les nocturnes promeneurs arrivent-ils sans peine sur la place de la Station.

À la première inspection, elle leur paraît déserte.

Le maquignon aurait-il manqué de parole à Sullivan ? Scipion frappe le sol d’un pied rageur. Quoi ? Il a confisqué un train, supprimé un arrêt, jeté la perturbation sur toute la ligne en pure perte.

Dans une heure peut-être le convoi maîtrisé rentrera en gare, et sa situation a lui, déjà si difficile, se compliquera d’une grave contravention à la police des railways.

Mais non… Des formes imprécises s’agitent dans un angle obscur de la place.

Vite Scipion se dirige de ce côté.

Victoire ! Un homme est là, qui tient en mains deux chevaux sellés. C’est l’employé du maquignon.

Scipion s’approche encore de l’individu :

— Joë Sullivan, lui dit-il, chef police-frontière.

Le palefrenier salue et riposte :

— Deux cents dollars.

— Les voici.

L’homme compte, puis glisse argent et banknotes dans sa poche.