Page:Ivoi - Massiliague de Marseille.djvu/162

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bleu et la terre fauve, baignés d’une lumière intense, crue, aveuglante.

Le soleil avait franchi le zénith, il descendait vers l’occident, et ses rayons obliques venaient frapper les troncs des arbres que, jusqu’à ce moment, le feuillage avait maintenus dans l’ombre.

— Il va falloir se mettre en route, murmura Marius en se dressant sur ses pieds.

Mais ce mouvement élargit son horizon visuel et, soudain, il se pencha légèrement en avant.

Son inspection dura une minute à peine, puis il courut à Scipion et le secoua brutalement.

— Hein ? quoi ? balbutia le Marseillais en se frottant les yeux.

Déjà le Texien avait repris son calme habituel :

— Que Monsieur se lève et selle les chevaux, dit-il placidement. Pendant ce temps, je vais barrer la route à ceux qui nous poursuivent.

Ces paroles réveillèrent complètement Massiliague.

— Ceux qui nous poursuivent !

D’un bond il s’était mis sur ses pieds.

Pour toute réponse, Marius étendit le bras vers l’Est, et son maître, regardant de ce côté, aperçut à deux milles environ une légère colonne de fumée qui montait obliquement vers le ciel, poussée par un faible vent d’ouest.

— Un feu ? demanda-t-il.

— Allumé par des Européens, affirma Marius. Jamais les Peaux-Rouges ne dressent un foyer dans la plaine. Ils savent que cela se distingue de trop loin.

— Pourquoi en conclure que ce sont nos ennemis ?

— Parce que ceux-là viennent d’Oklahoma comme nous. Le train ramené en gare, sir Sullivan a certainement cherché ses chevaux. Il a appris qu’on les avait enlevés… Que Monsieur conclue lui-même.

Le raisonnement était juste. Selon toute probabilité, la fumée était produite par un foyer que Sullivan et Bell avaient allumé. Scipion n’insista pas. Le temps n’était pas propice aux explications. Il se dirigea vers les chevaux et les revêtit de leurs harnais. De son côté, Marius tira son machete et, à quelques mètres en avant du bouquet d’arbres, faucha les herbes de place en place, de façon à former de petits tas de plantes sèches.

Scipion achevait de harnacher les chevaux.