Page:Ivoi - Massiliague de Marseille.djvu/166

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le Texien. Allons droit à leur village ; ils nous traiteront en amis.

Et sur cette affirmation, les cavaliers poussèrent leurs chevaux vers l’agglomération.

Mais à leur profonde surprise, aucun guerrier ne sortit à leur approche.

— Ah çà, on ne signale pas notre présence, grommela Marius, qu’est-ce que cela signifie ?

— Peut-être pensent-ils n’avoir rien à craindre de deux hommes qui ne se dissimulent point.

Le Texien secoua la tête :

— Non, non, que Monsieur chasse cette idée. Les passants sont rares dans le llano et ils excitent la curiosité. Les squaws (femmes) et la marmaille se groupent pour les voir, pour les questionner au besoin, car si les guerriers sont sobres de paroles, les Indiennes ne leur ressemblent guère.

Et avec un gros rire :

— Que la femme soit rouge ou blanche, elle joue toujours de la langue, monsieur. Et quoique les longs discours soient ennuyeux pour des gens fatigués, je préférerais encore les bavardages des squaws au silence qui règne ici.

Les cavaliers n’étaient plus qu’à cinquante pas des premières cabanes. Rien ne bougeait. Aucun indigène n’apparaissait, soit au seuil des huttes, soit dans les jardinets dont celles-ci étaient entourées.

— Bagasse, s’écria Scipion, le village est abandonné.

En effet, les voyageurs entraient dans l’enceinte sans qu’âme qui vive se montrât.

Bientôt, du reste, aucun doute ne subsista dans leur esprit. Les nattes qui ferment habituellement l’entrée des wigwams (cabanes) étaient enlevées ; les cases se montraient vides. Les scalps (chevelures enlevées à l’ennemi), les poteries grossières, les armes qui forment tout l’ameublement des habitations indiennes avaient disparu. Plus encore, le mât de totem (étendard d’une tribu) planté devant le wigwam du chef, reconnaissable à ses dimensions, le mât se dressait veuf de l’emblème qu’il supportait en temps ordinaire.

— Les habitants sont en expédition de guerre ou de chasse, dit Marius. Le village est abandonné. Ma foi, nous dormirons dans une case, cela nous vaudra mieux que la belle étoile coutumière.