Page:Ivoi - Massiliague de Marseille.djvu/170

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des morts, auprès du Peau-Rouge hoquetant son sauvage chant de mort.

Impressionnante était la scène.

Représentants de deux races rivales, de deux religions opposées, le Texien et le Séminole unissaient leurs voix pour implorer l’Infini selon le mode qui leur avait été enseigné.

Brusquement une des voix cessa de se faire entendre.

Le Cheval Noir avait exhalé son dernier soupir dans une ultime syllabe.

Le chef avait cessé de vivre.

Dans la hutte du défunt, les poteries, les armes, les instruments de culture avaient été pieusement laissés par ses proches, lors de leur départ.

Marius ferma les yeux du vieillard, puis montrant une bêche :

— Si Monsieur le permet, je vais creuser une fosse à ce vieux guerrier. Puisque la Madone a guidé nos pas vers son wigwam, c’est qu’elle ne veut pas que son corps reste exposé à la dent des bêtes sauvages.

Massiliague inclina la tête :

— Je t’aiderai, pitchoun.

En deux heures, les voyageurs eurent creusé le sol de la cabane assez profondément pour y coucher le chef, avec ses armes et les objets les plus précieux de son misérable ménage.

La fosse refermée, scellée de grosses pierres, ils assujettirent la porte et quittèrent le wigwam de l’Indien inconnu auquel ils avaient assuré la suprême demeure.

Au surplus, il était temps de se remettre en route.

Les chevaux largement abreuvés, gorgés d’herbe savoureuse, partirent d’une bonne allure et bientôt un pli de terrain déroba le village aux yeux des deux compagnons.

Ceux-ci se taisaient.

De l’aventure, à laquelle le hasard les avait inopinément conviés, ils emportaient une disposition mélancolique à la méditation. Distraits, ils se laissaient conduire par leurs montures.

Celles-ci trottaient dans le lit même de la rivière,