Page:Ivoi - Massiliague de Marseille.djvu/224

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yeux de ses interlocuteurs qu’un prétexte pour frapper Dolorès et ses compagnons. Cependant il tenta encore un effort :

— Le Vautour Rouge parle avec la sagesse d’un grand chef. Cela ne me surprend pas, car sa renommée était venue jusqu’à moi. Mais ses regards sont obscurcis par le sang de ses guerriers, il voit tous mes compagnons à travers un voile sanglant, et il ne distingue plus les innocents des coupables.

Puis adoucissant sa voix :

— La Mestiza cherche actuellement à affranchir les Sudistes. Créoles ou Peaux-Rouges, elle unit tous ceux du Sud dans une même tendresse. Elle n’est l’ennemie d’aucun.

Mais l’Indien l’interrompit violemment :

— Pourquoi mon frère souille-t-il ses lèvres d’un mensonge ?

— D’un mensonge ?

— Oui, celle que tu appelles la Mestiza sait bien qu’elle trompe les gens du Sud, que le Gorgerin d’Alliance n’existe pas… Que veut-elle donc ? Seulement nous détacher de notre Père de Washington (président des États-Unis) et nous mettre en guerre avec les guerriers vêtus de gris (soldats de l’union).

Soudain le Vautour Rouge s’apaisa :

— Nous n’écouterons pas sa voix mélodieuse ; les esprits du mal lui ont donné le charme, mais nous y resterons insensibles. Nous ne lui ferons aucun mal, si elle consent à venir s’asseoir à notre foyer. Elle sera remise au Père de Washington et vivra doucement dans une ville du Nord. Mais si elle nous contraint à brandir le tomahawk (hache) de guerre, elle mourra avec tous ceux qui l’accompagnent, et son scalp sera suspendu dans le wigwam d’un guerrier. J’ai dit.

Ces derniers mots indiquaient que le chef considérait la conférence comme terminée. Francis Gairon affecta de ne point le comprendre.

— Beaucoup des tiens succomberont dans la lutte. Ta tribu deviendra faible et sera réduite en esclavage par celles qui n’auront pas pris part à la lutte.

— Tous les Indiens du désert sont alliés, répliqua laconiquement le chef.

— Alliés à cette heure, le seront-ils encore dans quelques mois ? Et si tes guerriers ont jonché la