contre les Visages-Pâles qui, rassurés, ont quitté leur position avantageuse. Tu les extermines. Et plus tard, aux reproches des Séminoles, tu répondras : J’ignorais quels ils étaient. Lorsque le vaillant Cœur de Feu est venu m’apporter vos ordres, il était trop tard.
Comme on le voit, le géant ne manquait pas de ressources. Ce fut sans doute l’avis du Vautour Rouge, car il pressa la main de son compagnon et doucement :
— Bison, tu partiras avec l’Ocelot. Je te confie le soin de nous venger de l’insolence du jeune Séminole.
— Et toi ?
— J’exécuterai le plan que tu as tracé.
— En recommandant le silence à nos guerriers.
— Sois tranquille. La haine du Séminole chante en eux. Ils seront heureux de jouer ces hommes rouges qui nous oppriment aujourd’hui plus que les Américains eux-mêmes.
Une fauve lueur brilla dans les yeux sombres de l’Apache et les deux chefs se séparèrent.
Bientôt tout le camp fut en rumeur. Les guerriers avaient appris qu’on abandonnait le siège qui durait depuis de si longues semaines ; que l’on agissait ainsi sur l’ordre des Séminoles ; qu’un chef de cette dernière nation accompagnerait la troupe durant la première journée de sa retraite.
De là, colères muettes, trahies seulement par des gestes brusques, des regards étincelants.
Mais tous dissimulaient avec soin leur irritation. Tous comprenaient le danger de se mettre en lutte ouverte avec la nation indienne qui, à elle seule, peut armer plus de guerriers que toutes les autres tribus réunies.
À l’abri de sa tente, le Vautour Rouge observait tout, et son visage, peint d’ocre rouge, s’éclairait.
Les Indiens étaient prêts à toutes les trahisons. Le plan ourdi par l’astucieux Bison s’accomplirait jusqu’au bout.
Quant au chef apache, il avait entraîné l’Ocelot sous sa tente propre, et là lui parlait à voix basse.
Au tressaillement des narines du jeune homme, à l’animation de ses traits, à ses poings crispés, il était aisé de deviner que les paroles du géant allumaient en lui un courroux farouche.