Du coup, Scipion se décida à ouvrir un œil.
— Vé, fit-il d’une voix mal assurée, est-ce qu’il y aurait des moustiques par ici !
Mais sa phrase se termina par une exclamation.
— Mille diablos !… je ne me trompe pas, c’est Coëllo.
Elle mit un doigt sur ses lèvres :
— Chut !
— Du mystère, reprit gaiement Scipion en mettant toutefois une sourdine à sa voix, du mystère… Aurais-tu gagné ton once d’or, mon brave ?
À ce rappel de sa propre situation, Vera rougit légèrement. Mais l’obscurité empêcha son interlocuteur de s’apercevoir de son trouble et elle répondit :
— Non. J’ai trouvé autre chose que je ne cherchais pas.
— Autre chose ?
— Oui. Vous m’aviez chargé de découvrir une señora.
— Sans doute.
— Eh bien ! le hasard m’a fait rencontrer un homme.
— Un homme ?
— Et, qui plus est, un traître.
Cette fois, Massiliague sauta sur ses pieds, et se prenant la tête à deux mains :
— Que tu me racontes, pitchoun. Un traître… un traître à qui, à quoi ? Parle donc. Tu me laisses là sur une jambe au milieu de ton histoire…
« Enfin, veux-tu parler ?
— Dès que vous m’en laisserez le temps, je ne suis ici que pour cela.
— Va donc, Coëllo, je serai muet comme une dorade en bouillabaisse… Alors, nous disons un traître.
— Oui, señor, un agent de Joë Sullivan.
— Joë Sullivan, le gredin qui m’avait fait prisonnier.
— Lui-même.
— Et cet agent… que le diable de l’Esterel le grille… cet agent, où est-il ?
— Dans le camp, señor.
— Dans le camp !
Scipion avait saisi les mains du faux Coëllo.
— Tiens, fit-il, tu as des mains fines comme une dame.