Page:Ivoi - Massiliague de Marseille.djvu/279

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sions du père, je voulais savoir si les idées de sa demoiselle, elles cadraient avec les miennes — donc, je me présente à la bastide.

— Té, bonjour, la Louisette, que je dis.

— Té, bonjour, Marcassou, qu’elle riposte.

— Et autremain, toujours bon pied, bon œil, que je continue.

— T’es pas myopre, qu’elle susurre, donc tu dois être rassuré sur l’œil ; quant au pied, si tu veux le juger, tourne-toi un peu pour voir.

Elle faisait mine de me botter… Un ange, cette Louisette !

— Laisse ton pied, que je fais en soupirant, c’est de ta main que je désire te parler.

— Ma main, si une gifle doit te satisfaire…

— Eh non ! ma mie, s’agit pas de la main frappeuse, mais de la main conjugale.

— Conjugale !…

Elle soupira si fort que bien sûr les moulins de l’Estaque tournèrent. Et elle rougit, la pauvre, comme un coucher de soleil. La fanfare du Vieux-Port lui aurait donné aubade si elle l’avait vue arborer ainsi la couleur de la République.

Enfin, de sa voix la plus douce, elle laissa tomber ces paroles :

— Ta proposition m’honore, Marcassou… d’autant plus que tu es venu à une heure de relevée, c’est-à-dire au moment le plus brûlant de la journée. Tu plains pas ta peine, mon bon, et cela m’est un gage de la sincérité de ton affection.

— Alors, tu consens, eh ?

— Je n’ai pas dit cela.

— Tu n’as pas dit le contraire non plus.

— C’est vrai.

Et elle secoua sa jolie tête que couvraient des cheveux noirs si touffus qu’elle aurait pu se cacher derrière et dire : Je n’y suis pas. Tout le monde l’aurait cru.

— Seulement… fit-elle enfin.

— Dis ton seulement.

— Ainsi fais-je… j’ai prononcé un serment.

— Bah !

— Oui. J’ai juré à mon père, l’honorable Bombardade, de vivre à ses côtés jusqu’à son dernier soupir, à moins…

Elle s’arrêta.