Page:Ivoi - Massiliague de Marseille.djvu/291

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Au départ de leurs ex-compagnons, Pierre, dont les mains étaient libres, avait ramassé le couteau du Mayo et délivré Francis.

Puis les deux hommes avaient tenu conseil.

— Chef, dit Pierre, qu’allons-nous faire ?

— La suivre, répliqua Francis.

— Bon, nous ne la rejoindrons pas. Nous à pied, elle à cheval.

— Là, là… tu sais que les Nordistes barrent la route qu’elle doit suivre.

— Oui.

— Eh bien ! cela ne nous indique-t-il pas notre devoir ?

— Sans doute, seulement…

— Seulement quoi ?

— Il faudra être auprès de la doña avant trois jours.

— Parce que…

— Parce que nous n’avons rien à manger. Pour toute arme, un couteau. Si dans trois jours nous n’avons rien mangé, nous serons à bout de forces et nous n’aurons plus qu’à nous coucher pour attendre la fin.

Francis secoua la tête d’un mouvement obstiné :

— Il faut que nous marchions… Je sens qu’elle aura besoin de nous.

— Oh ! ce que j’en dis, fit placidement l’engagé, ce n’est pas pour vous contrarier, je suis votre compagnon. Où vous irez, j’irai. Tant que vous voudrez aller de l’avant, je marcherai… et quand vous vous étendrez pour râler votre chant de mort, soyez sûr que je serai étendu à côté de vous.

Il est impossible d’exprimer le dévouement avec une plus tranquille insouciance.

Gairon serra longuement la main de Pierre.

— Ah ! fit-il, pourquoi as-tu demandé à partager mon sort ?

— Dame, chef, quand on s’engage, ce n’est pas seulement pour faire de bons repas et se promener les mains dans les poches. Vous en savez quelque chose, vous qui êtes victime de votre signature à Joë Sullivan.

— Pour un mois encore, soupira le chasseur.

Mais Pierre eut un gros rire :

— Non, non, pas pour un mois, chef… Vous serez libéré avant. Que les sorcières de l’Ontario me tor-