Page:Ivoi - Massiliague de Marseille.djvu/307

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L’officier se leva aussitôt et courut donner des ordres.

Quant à Joë, il salua les Canadiens de la main, et se retira sous le dolmen.

L’interrogatoire était terminé.

Bras dessus, bras dessous, les chasseurs rejoignirent le gros du détachement. Entourés par les soldats, ils racontèrent leur odyssée avec la même… fantaisie qu’à Sullivan lui-même.

Mais leur bonne grâce eut sa récompense : bouillon au Liebig, café, viande de conserve préparée par la maison Armour, de Chicago, leur furent offerts de copieuse façon.

Si bien qu’après avoir pensé mourir de faim, ils entrevirent l’instant où ils trépasseraient d’indigestion.

Décidément remis, se sentant dans les plus heureuses dispositions, ils décidèrent qu’un tour de promenade conviendrait tout à fait à leur état de santé.

Et sans se presser, en bons bourgeois sortant de table, ils flânèrent dans le vallon Green Rocks.

Loin des oreilles indiscrètes, les deux compères ne purent se tenir de rire. 

— Non, chef, commença Pierre, il faut que je vous félicite. Vous avez une façon de raconter l’histoire qui mettrait en gaieté un castor.

— Pouvais-je dire la vérité sans jeter ces damnés Nordistes sur la trace de cette sainte enfant, la Mestiza ?

— Ce n’est pas ce que je prétends dire. Seulement votre récit était si bien arrangé que je me demandais si, vraiment, les choses ne s’étaient point passées ainsi.

— Alors, le Sullivan n’a pas eu de doutes, d’après toi ?

— Lui… allons donc… Il vous regardait avec compassion. Dans ses yeux, je lisais aussi clairement que dans un livre.

— Tu lisais ?

— Ceci, chef : Braves gens que ces chasseurs, mais aussi maladroits que possible. Ceux-ci se sont fait pincer bêtement et ils ne comprendront jamais pourquoi.

— Je désire que telle fut son opinion.

— Parbleu ! je l’ai compris.

— Au surplus, doña Dolorès — Joë n’est plus là,