Page:Ivoi - Massiliague de Marseille.djvu/330

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devoir existait à mes yeux : vous servir, vous dévouer ma vie.

Et avec un profond soupir :

— Oui, je sais, je ne mérite pas votre confiance. Qu’était ma parole auprès de vous ? Rien. J’aurais dû la dédaigner. Ç’a été une prétention vaniteuse et ridicule de vouloir la sauvegarder. J’aurais dû me déshonorer pour vous servir… Mon déshonneur, la belle affaire, quand il s’agissait de vous mettre hors d’atteinte de vos ennemis, de permettre à la Vierge mexicaine de réussir dans son entreprise libératrice. Je ne suis pas digne de recevoir votre secret. Pour les besognes pures, il faut des mains pures et sur les miennes le sang, votre sang, a laissé sa trace.

« Non, doña… Voyez en moi un esclave, un messager subalterne. À ceux qui n’ont pas démérité, envoyez sous enveloppe vos instructions. Je vous jure que je ne chercherai pas à les connaître.

Le remords, l’angoisse palpitaient dans la voix du Canadien.

Sans doute, Dolorès comprit que le traître d’hier était arrivé au dévouement aveugle, absolu, car elle vint vers lui, lui reprit les mains et avec une bonté souveraine :

— Vous vous trompez… C’est à vous-même que je confie mon secret.

— À moi ?… bégaya-t-il, éperdu.

— À vous que le repentir a lavé de vos fautes ; à vous que la douleur a rendu digne de ma confiance.

Et dans le silence du milieu du jour, troublé seulement par la chanson métallique des cigales, elle parla.