Page:Ivoi - Massiliague de Marseille.djvu/357

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un charbonnage lui apparaissaient comme choses sans importance, sans intérêt.

Mais si le hasard lui mettait sous les yeux une histoire étrange d’hallucination, de télépathie, de spiritisme ou d’hypnotisme, alors son cœur palpitait, ses méninges se dilataient agréablement.

Avec cela, paresseux au possible, ce singulier personnage aurait considéré comme un blasphème le vers célèbre de La Fontaine :

Aide-toi, le ciel t’aidera.

À son avis, le ciel devait tout faire, le rôle de l’homme se bornant à la prière.

Et comme Cristobal, actif, débrouillard, faisant sa fortune sans diminuer celle de son maître, travaillait beaucoup, que le rendement de la propriété augmentait chaque année, Ramon répétait complaisamment :

— Ma vie est un exemple de sagesse humaine. J’égrène mon chapelet, Dieu fait le reste, et mon caoutchouc croît et multiplie.

C’est chez ce bizarre resinero que nous retrouvons le révérend Forster, escorté par Joë Sullivan et toute la garnison du fort Davis.

Dans le salon, — ainsi nommé parce que l’on y recevait les voyageurs d’importance, — dans le salon, meublé de sièges grossiers fabriqués à Arispe et dont les murs blancs n’avaient pour décoration que d’innombrables emblèmes de piété, Forster parlait :

— Oui, noble resinero, cette Dolorès Pacheco était enfermée au fort Davis.

— C’est que le ciel l’avait permis, glissa onctueusement Ramon.

— Évidemment, reprit le pasteur. Nous croyions avoir mis fin à l’exécrable esprit de guerre qui souffle sur le Sud de l’Amérique. Or, un soir, des colporteurs sollicitèrent l’hospitalité. On la leur accorda. Le lendemain, ils avaient disparu et la prisonnière avec eux.

— Le Seigneur est le Lion de Juda, psalmodia le propriétaire. Il dévore le coupable et délivre l’innocent.

Forster fronça les sourcils :

— Ah çà ! voilà tout ce que vous trouvez à dire ?

— La vertu consiste à se confier à l’incommensu-